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Dissolution confusion d’une SCI après réévaluation de ses immeubles

Réuni en formation plénière, le Conseil d'État juge que la jurisprudence « Quemener » est applicable en cas de TUP, même en l'absence de double imposition de la plus-value sur les actifs.

Rappel des principes issus de la jurisprudence « Quemener »

Dans le cas où une société retire de l’actif de son bilan, à la suite d’une cession ou de la dissolution sans liquidation avec confusion de patrimoine prévue à l’article 1844-5 du code civil, les parts qu’elle détenait jusqu’alors dans une société de personnes, le prix de revient des parts à retenir pour calculer la plus-value ou la moins-value doit être corrigé.

En premier lieu, la valeur d’acquisition des parts doit être majorée d’une part, de la quote-part des bénéfices de cette société revenant à l’associé qui a été ajoutée aux résultats imposés de celui-ci, antérieurement à la cession et pendant la période d’application du régime des sociétés de personnes, d’autre part, des pertes afférentes à des entreprises exploitées par la société et ayant donné lieu de la part de l’associé à un versement en vue de les combler.

En second lieu, cette valeur d’acquisition doit être minorée, d’une part, des déficits que l’associé a déduits pendant cette même période, à l’exclusion de ceux qui trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif et, d’autre part, des bénéfices afférents à des entreprises exploitées en France par la société et ayant donné lieu à répartition au profit de l’associé.

Cette règle a pour objet d’assurer la neutralité de l’application de la loi fiscale, compte tenu de la nature spécifique du régime des sociétés de personnes.

Règle applicable en cas de réévaluation des actifs sociaux

La règle rappelée ci-avant trouve notamment à s’appliquer à la quote-part de bénéfices revenant à l’associé d’une société soumise de personnes lorsque ces bénéfices résultent d’une réévaluation des actifs sociaux .

La réévaluation peut être opérée par l’administration fiscale dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle et dans ce cas elle a pour effet d’accroître rétroactivement la base d’imposition de la société au titre de la période d’imposition close par la dissolution de la société et l’annulation consécutive des parts détenues par l’associé. La réévaluation peut intervenir au moment de la dissolution de la société.

Les faits de l’affaire

Les titres d’une société civile immobilière (SCI) ont été apportés à une société X soumise à l’IS, pour une valeur fondée sur la valeur réelle, supérieure à la valeur comptable, de l’actif détenu par la SCI.

La SCI a opéré une réévaluation libre des immeubles inscrits à son actif.

La société X a ensuite décidé la dissolution de cette SCI, avec transmission universelle de son patrimoine.

Pour le calcul de son résultat, la société a appliqué les corrections rappelées ci-avant aux fins de déterminer le gain résultant de cette dissolution sans liquidation, mais l’administration fiscale a remis en cause ces corrections extra-comptables.

Décision de la Cour administrative d’appel de Paris...

La Cour administrative d’appel a estimé que l’apport à la société X des parts de la SCI avait été valorisé sur la base de l’actif net réévalué de cette dernière, de sorte que le prix d’acquisition de ces parts tenait compte de la valeur vénale de l’immeuble (CAA Paris 17 mai 2017, n° 16PA01892).

La Cour en a déduit que, si le profit résultant de la réévaluation libre opérée par la SCI avant sa dissolution avait été inclus dans les bénéfices taxables de la société X en vertu du régime des sociétés de personnes, et n’avait pas été pris en compte une seconde fois au titre du résultat de l’opération de dissolution-confusion de la SCI, de sorte que la société X n’avait subi aucune double imposition.

... annulée par le Conseil d’État réuni en formation plénière

Pour déterminer le gain résultant de la dissolution sans liquidation de la SCI avec transmission universelle de son patrimoine au profit de la société X, dans l’hypothèse où tout ou partie des bénéfices réalisés par la SCI avant sa dissolution procèdent de l’existence d’un excédent de la valeur réelle de ses actifs sur leur valeur comptable, la Cour a commis une erreur de droit en subordonnant la mise en œuvre du mode de détermination du prix de revient des parts à la condition :

- que la valeur à laquelle les parts sont inscrites à l’actif de l’associé reflète la valeur comptable de ces actifs et non leur valeur réelle,

- et que, par conséquent, ces bénéfices soient pris en compte une seconde fois, au titre du résultat de l’opération de dissolution-confusion, dans les résultats de l’associé.

Par cette jurisprudence, le Conseil d'État admet que le dispositif de correction du prix de revient s'applique en cas de TUP, et qu'il ne doit pas réservé au cas de double imposition au niveau des associés de la SCI, comme il l'avait jugé dans une précédente affaire (CE 6 juillet 2016, n° 377904).

CE 24 avril 2019, n° 412503

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